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11/04/2020

Sur vos écrans en 1942

EDITORIAL :

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Extraits de La France de Pétain et son cinéma, Jacques Siclier, Éditions Henri Veyrier, 1981, et Ramsay Poche Cinéma, 1990 :

"Lorsque nous, spectateurs, voyions apparaître au générique d'un film le sigle de la Société Continental, un large C majuscule inscrit dans un cercle, nous ne savions pas que cette société était dirigée par un Allemand et se trouvait liée à Berlin. Si on nous l'avait dit, nous aurions eu du mal à le croire. Les films produits par la Continental étaient, à nos yeux, des films français comme les autres, relevant de "genres" éprouvés, réalisés par des cinéastes connus, interprétés par des vedettes, des acteurs et actrices que nous aimions. Qu'une griffe allemande s'y fût posée, nous en sommes tombés des nues après la Libération, quand de violentes attaques furent portées publiquement contre la Continental et spécialement contre Henri-Georges Clouzot et Le Corbeau. J'insiste là-dessus. En dehors de Paris, des milieux professionnels, le nom d'Alfred Greven, le fonctionnement de la firme dont il était le chef étaient ignorés du grand public. Ce mot Continental avait toujours évoqué, pour moi, un numéro musical de La Joyeuse Divorcée, film américain avec Fred Astaire et Ginger Rogers. La chanson Continental, Continental... m'était restée dans la tête. Si ces "révélations", qui tombèrent dru comme grêle, me surprirent, elles ne provoquèrent chez moi aucune indignation rétrospective ni l'impression d'avoir été endoctriné malgré moi par les Allemands, les autorités d'occupation. Je n'ai pas attendu la "réhabilitation" du Corbeau pour considérer ce film comme une œuvre importante du cinéma français, et Clouzot, dont j'avais suivi la carrière avec le plus vif intérêt, comme un des grands cinéastes révélés à cette époque."

"Le succès du Dernier des six et du couple Pierre Fresnay-Suzy Delair incita la Continental à produire une suite. Ce fut L'assassin habite au 21, que Clouzot fut chargé de réaliser. Le personnage de Mila Malou y prit une grande importance et fit de Suzy Delair une vedette. Clouzot remania considérablement le roman de Steeman, dont l'action se passait à Londres et où n'apparaissait pas le commissaire Wens, mais la police de Scotland Yard. En fait, il en garda la trame - une enquête dans une pension de famille dont l'un des locataires est un assassin - et l'idée originale du meurtrier en trois personnes. (...) L'assassin habite au 21 n'était pas dénué d'humour, et Clouzot y manifestait son réalisme noir. Dans le climat pittoresque de la pension évoluait une faune ambiguë, dont chaque représentant pouvait être un assassin en puissance, sous le couvert d'un anonymat soigneusement établi pour brouiller les pistes. On retrouvera cette ambiguïté - magnifiquement amplifiée - dans Le Corbeau. Les dialogues caustiques et mordants, la mise en scène bien construite de L'assassin habite au 21 révélèrent un cinéaste-auteur dont l'univers, la vision du monde, portaient un certain trouble. Jean Tissier, Pierre Larquey et Noël Roquevert, acteurs très typés, étaient distribués à contre-emploi, ce qui accentuait l'étrangeté, le "non-conformisme" (envers le genre policier) du film."

 

LES CONSEILS DE NOTRE EQUIPE :

Une liste de 41 longs métrages (sur les 322 sortis en salles) avec, pour les étoiles en couleur, des liens vers des textes écrits par les contributeurs.

  Christophe Edouard Vincent DrOrlof Ludovic FredMJG Nolan Jean-Luc
L'Assassin habite au 21 *** ** **** ** **** **** *** *
Les Visiteurs du soir ° * *** * *** ***   **
Les Inconnus dans la maison **   ***   **     *
Le Mariage de Chiffon *** **     **      
Le Retour du proscrit **   ***          
Le Jeune Hitlérien Quex ***       **      
Le Destin fabuleux de Désirée Clary ** *           **
Dernier Atout *   ***          
Macao, l'enfer du jeu *       ***      
Caprices ***              
Lettres d'amour ***              
Les Nouvelles Aventures de Flash Gordon           ***    
La Nuit fantastique *       **      
L'Arlésienne     **   *      
La Symphonie fantastique         * *   *
La Piste du Nord **              
L'Assassin a peur la nuit         **      
Simplet     **          
Le Mystérieux Docteur Satan           **    
Le Visage derrière le masque           **    
Le Tigre du Bengale °             **
Le Tombeau hindou °             **
La Duchesse de Langeais *       *      
Lumière dans les ténèbres         *      
Boléro         *      
Manon Lescaut         *      
Le Journal tombe à cinq heures *              
La Fausse Maîtresse *              
Monsieur La Souris *              
Le Bienfaiteur *              
Beatrice Cenci         *      
Le Siège de l'Alcazar         *      
Miracles à vendre *              
Nick Carter détective *              
Le Repaire infernal           *    
Les Gens du voyage *              
Une aventure de Salvator Rosa °              
Annette et la dame blonde °              
La Comédie du bonheur °              
Le Voile bleu °              
  Christophe Edouard Vincent DrOrlof Ludovic FredMJG Nolan Jean-Luc

 

A VOUS LA PAROLE !

A notre suite, nous vous invitons à dresser votre propre palmarès de l'année et à nous le faire parvenir, par l'intermédiaire des commentaires ou du bouton de contact, afin que nous le mentionnions à son tour ci-dessus
(vous pouvez consulter la liste de tous les films de long métrage sortis en France en 1942 sur le site Encyclo-Ciné)

07/03/2020

Sur vos écrans en 1943

EDITORIAL :

Par Vincent J.

Corbeau00.jpg

1943, le tournant, les tournages

L'année 1943 marque un tournant de la Seconde Guerre Mondiale. La capitulation à Stalingrad début février marque la première grande défaite de l'armée allemande sur le front de l'Est. Les forces de l'axe sont défaites en Afrique du Nord et, le 9 juillet, les Alliés débarquent en Sicile. Face à leur avance, le roi Victor-Emmanuel III obtient la démission de Benito Mussolini et de son gouvernement le 25 juillet. Dans la foulée, l’Italie demande un armistice qui amène les allemands à envahir la péninsule. Le 9 septembre, Rome est envahie par les troupes allemandes qui pillent le "Centro Sperimentale di Cinematographia", école créée dans les années trente, et ses riches collections de films. L'impact de ces événements va rejaillir sur le cinéma français, sur la partie du moins qui était installée dans les Alpes-Maritimes autour des studios de la Victorine, alors sous contrôle italien. Deux productions sont alors en chantier : le nouveau film de Marcel Carné, Les Enfants du paradis et La Boîte aux rêves de Jean Choux et Yves Allégret. Carné, Jacques Prévert et l'équipe technique, dont certains membres sont dans la clandestinité, comme le décorateur Alexandre Trauner, ont préparé le film dans une villa de Vence. Il bénéficie d'une coproduction avec l'Italie et le tournage a débuté le 16 août. Des liens se sont tissés avec les studios romains de Cinecittà, permettant par ailleurs de transférer des français sous le coup du STO (service du travail obligatoire) ou des juifs pourchassés après la fin de la « zone libre » en 1942. Rapidement l'annonce (fausse) d'un débarquement à Gênes provoque l'interruption des tournages. Le 9 septembre, les troupes allemandes occupent Nice, l'interruption est définitive. Les studios sont fermés et leur patron, André Paulvé, reste seul à essayer de sauver matériel et décors. Les studios Pathé de Paris vont accueillir le film de Carné pour un temps avant un retour dans le Sud en février 1944.
La mort dans l'âme, Abel Gance a quitté la France pour l'Espagne à l'été 43, malgré sa renommée et ses efforts pour se faire retirer de la liste juive. Il avait pourtant été très actif auprès du pouvoir pour développer une production authentiquement française autour de la Victorine. Les studios auront bien fonctionné durant le premier semestre avec surtout L’Éternel retour de Jean Delannoy, l'un des gros succès de l'année qui lancera la mode des pull Jacquard portés par Jean Marais et de la chevelure blonde et lisse de Madeleine Sologne, deux icônes de la jeunesse du moment. Lumière d'été, œuvre majeure de Jean Grémillon, tournée en partie à la Victorine, en partie en Corrèze, sur le site du barrage de l’Aigle en construction (régulièrement saboté par la Résistance), sort dans une atmosphère houleuse et ne sera pleinement apprécié qu'après la Libération. À La Gaude, Marcel Pagnol s'est mis à l'écart et, refusant de travailler pour l'occupant, il développe la culture des œillets en employant le personnel de ses studios comme ouvriers horticoles pour leur éviter le STO en Allemagne.
À Paris, la politique d'Alfred Greven et de la Continental, société de production montée par les Allemands en France, porte de beaux fruits, paradoxe d'une époque. Ce sont les sorties de La Main du Diable de Maurice Tourneur, rare incursion du cinéma français dans le fantastique, de Picpus de Richard Pottier d'après Simenon, de Au Bonheur des Dames d’André Cayatte d'après Émile Zola, du Val d'enfer de Maurice Tourneur, encore lui, et surtout, emblématique de son temps, du Corbeau d’Henri-Georges Clouzot, avec ses lettres anonymes, sa lampe qui se balance entre l'ombre et la lumière et ses français si moyens. Ce sont aussi, hors de la Continental, Marie-Martine d'Albert Valentin, avec une prestation mythique de Saturnin Fabre (« Tiens ta bougie...droite ! »), le premier long métrage de Robert Bresson, Les Anges du pêché, et un premier chef d’œuvre signé Jacques Becker Goupi Main-Rouges, autre peinture d'une certaine France où « la terre ne ment pas » mais pleine d'ironie. Le 8 mars s’éteint Harry Baur. Immense vedette de l'époque à l'égal de Raimu, Baur a régulièrement été accusé d’être juif, voire communiste, par la presse collaborationniste. Malgré les gages donnés à la Continental et un film tourné à Berlin où il a été piégé par la Tobis (autre société de production allemande), il est dénoncé et arrêté par la Gestapo en mai 1942 avec son épouse. Détenu et torturé quatre mois, il est libéré dans un état de faiblesse extrême et les séquelles sont telles qu'il ne se remet pas. Il est enterré au cimetière du Montparnasse et les autorités allemandes, pour ne pas être accusées d'avoir causé la mort d'un acteur si populaire, censurent l'information. Ainsi va le cinéma français en ces temps sombres...

 

LES CONSEILS DE NOTRE EQUIPE :

Une liste de 33 longs métrages (sur les 202 sortis en salles) avec, pour les étoiles en couleur, des liens vers des textes écrits par les contributeurs.

  Christophe Edouard Vincent Ludovic Nolan Dr.Orlof FredMJG
Le Corbeau **** **** **** **** *** *** ****
Goupi Mains rouges **** ** **** **   *** ***
Lumière d'été **   **** ****   *** ****
La Main du diable *** * **** ***   ** ***
Les Anges du péché *** ***   ***   ** ***
Douce **** ***   ***     ***
Le Val d'enfer ****   *** **     **
Le Capitaine Fracasse *** *   ** **   **
L'Eternel Retour °   ** **     ***
Marie-Martine *   ***       **
La Couronne de fer **     **     **
Voyage sans espoir *   ***        
Le Baron fantôme *     *     **
Picpus     ***        
Adieu Léonard     ***        
Lumière dans la nuit ***            
Le Navire blanc **            
La Ville dorée       **      
Au bonheur des dames       **      
L'Homme de Londres       **      
Donne-moi tes yeux **            
La Ferme aux loups             **
Le Comte de Monte-Cristo *     *      
Une femme dans la nuit       *      
Le Loup des Malveneur *            
Secrets       *      
Les Deux Orphelines       *      
Les Mystères de Paris       *      
Le Colonel Chabert *            
Pierre et Jean *            
Dora Nelson *            
La Bonne Etoile °            
Ne le criez pas sur les toits °            
  Christophe Edouard Vincent Ludovic Nolan Dr.Orlof FredMJG

 

LES CHOIX DE NOS AMIS ET LECTEURS :

Pierre :
1-Le corbeau (Clouzot)**** 2-Adieu Léonard (Prévert)**** 3-Goupi mains rouges (Becker)*** 4-Donne moi tes yeux (Guitry)*** 5-Le baron fantôme (de Poligny)*** 6-La main du diable (Tourneur)** 7-Le capitaine Fracasse (Gance)** 8-Au bonheur des dames (Cayatte)** 9-Les mystères de Paris (de Baroncelli)** 10-Le comte de Monte-Cristo (Vernay)** 11-L'éternel retour (Delannoy)** 12-Titanic (Klinger et Selpin)** 13-Forces occultes(Mamy)* 14-Les ailes blanches (Péguy)*

 

A VOUS LA PAROLE !

A notre suite, nous vous invitons à dresser votre propre palmarès de l'année et à nous le faire parvenir, par l'intermédiaire des commentaires ou du bouton de contact, afin que nous le mentionnions à son tour ci-dessus
(vous pouvez consulter la liste de tous les films de long métrage sortis en France en 1943 sur le site Encyclo-Ciné)

10/11/2013

Sur vos écrans en 1960

EDITORIAL :

Par le Dr. Orlof

psycho00.jpgL’homme au volant est jeune et se dirige vers Paris. Il vient de voler la voiture qu’il conduit. Dans l’habitacle, il soliloque, fredonne, hésite à prendre des autostoppeuses puis se ravise ("après tout, elles sont trop moches"), râle et soudain regarde le public dans les yeux et déclare : "si vous n’aimez pas la mer, si vous n’aimez pas la montagne, si vous n’aimez pas la campagne, allez vous faire foutre !"
Au-delà de la provocation, cette première séquence d’A bout de souffle illustre parfaitement l’état d’esprit de cette "nouvelle vague" qui déferle actuellement sur le cinéma français. Avec son premier long-métrage, Jean-Luc Godard fait voler en éclats les codes de la grammaire cinématographique et signe une œuvre insolente et d’une fraicheur inouïe. Quant à cette adresse aux spectateurs (impensable dans le cadre du cinéma traditionnel), elle fait également figure de manifeste du jeune cinéma français. Une sorte de déclaration de guerre contre ce cinéma "de qualité" vilipendé par Truffaut : plutôt que de filmer des histoires vieillottes en studio, il s’agira désormais de sortir dans la rue, de montrer la mer, la campagne, la montagne mais également les cafés, les copains, les rues de Paris. Bref, tenter de saisir l’air du temps et la fugacité de l’instant présent.
Si François Truffaut s’éloigne de la dimension autobiographique qui fit le succès de ses 400 coups,  son deuxième long-métrage Tirez sur le pianiste conserve un style, un rythme qui ont séduit notre équipe. Claude Chabrol signe déjà son quatrième long-métrage et nous offre avec Les Bonnes femmes une œuvre acerbe et cruelle parfaitement maitrisée.
En revanche, si deux anciennes plumes des Cahiers du cinéma sont passées cette année à la réalisation, leurs œuvres ont moins convaincu, qu’il s’agisse de Pierre Kast qui signe pourtant avec Le Bel âge une œuvre élégante et littéraire ou de Jacques Doniol-Valcroze dont le film L’Eau à la bouche ne restera dans les mémoires que pour la chanson titre écrite par Serge Gainsbourg.

Même si elle prend un visage un peu différent, cette modernité incarnée par la "Nouvelle Vague" française semble gagner des pays voisins. Deux films italiens marquants l’ont prouvé cette année. Si votre serviteur ne partage pas totalement l’enthousiasme de l’équipe pour L’Avventura de Michelangelo Antonioni (film sifflé à Cannes cette année), ce film pétri d’angoisses existentielles marque indubitablement une nouvelle étape dans la modernité cinématographique. Avec La Dolce vita (célébré à Cannes par la Palme d’or), Fellini signe son film le plus abouti, le plus ample et nous offre un panorama assez stupéfiant des mœurs de l’Italie d’aujourd’hui.

L’année 1960 confirme également l’émergence d’une autre "nouvelle vague", beaucoup moins médiatisée, celle de l’épouvante britannique. Depuis quelques années, les studios de la Hammer nous proposent des relectures passionnantes des grands mythes du fantastique jadis illustrés par les studios Universal. Les Maitresses de Dracula prouve une fois de plus le talent du cinéaste Terence Fisher et le renouveau d’un genre qui méritait bien cet apport de sang frais. Toujours en Angleterre, les producteurs Robert Baker et Monty Berman nous ont permis la découverte de Jack l’éventreur et surtout de ce petit chef-d’œuvre de John Gilling intitulé L’Impasse aux violences, nouveau fleuron de ce cinéma d’épouvante mettant en scène des "résurrectionnistes" et jouant sur des atmosphères macabres et oppressantes.

Même si c’est un film un peu à part, Le Voyeur de Michael Powell, fort apprécié par notre équipe, pourrait marquer une sorte de quintessence de cette "horreur à l’anglaise" : un goût prononcé pour un érotisme morbide, une maitrise parfaite des codes de l’angoisse, une exploration sans limite des zones d’ombre de l’âme humaine. Mais ce qui distingue le film de Powell, c’est sans doute cette réflexion sur la nature même du cinéma qu’il propose puisque son héros est à la fois le metteur en scène démiurge "abusant" de ses modèles et le spectateur lui-même qui jouit de la mort des personnages sacrifiés. De ce point de vue, l’œuvre est vertigineuse.

Là encore, ce goût du fantastique et de l’épouvante semble se propager aux pays voisins. Michel Simon a tourné cette année dans un très curieux film allemand signé Victor Trivas : La Femme nue et Satan où l’on retrouve ce mélange de fantastique et d’érotisme. Même la très cartésienne France ne fut pas en reste cette année. Si Le Testament d’Orphée prolonge les expérimentations poétiques et merveilleuses de Jean Cocteau avec un résultat qui divise notre équipe, Georges Franju a obtenu tous les suffrages avec son merveilleux Les Yeux sans visage, exemple unique d’un fantastique français jouant avant tout sur la suggestion et la poésie mystérieuse du Réel.

Pour conclure, c’est le maître du suspense Alfred Hitchcock qui s’invite une fois de plus au sommet de nos films préférés et qui signe avec Psychose une œuvre qui relève autant du thriller que de l’épouvante pure. Gageons que plus personne ne pourra désormais prendre une douche sans avoir en tête les images de Janet Leigh assassinées ni celles de la fin du film. Mais chut ! Laissons aux heureux spectateurs qui ne l’auraient pas encore vu le plaisir d’avoir leurs plus beaux frissons d’une année qui n’en fut pourtant pas avare…

 

LES CONSEILS DE NOTRE EQUIPE :

Une liste de 114 longs métrages (sur les 451 sortis en salles), avec, pour les étoiles en couleur, des liens vers des textes écrits par les contributeurs.

  Buster Christophe Dr.Orlof Edouard FredMJG Jean-Luc Jocelyn Ludovic Rémi Vincent
Psychose (Hitchcock) *** *** **** **** **** *** **** *** **** ****
A bout de souffle (Godard) **** ** **** **** **** **** **** *** **** ****
Les Contrebandiers de Moonfleet (Lang) **** **** ** **** **** **** *** ****   ****
L'Intendant Sansho (Mizoguchi) **** ****   ***   ***   *** **** ****
Le Voyeur (Powell) **** ** *** **** **** ** **** **** **** ****
Les Yeux sans visage (Franju) **** ** *** **** **** ** **** **** **** ****
Le Trou (Becker) **** ****   **** **** ** *** ****   ***
La Dolce vita (Fellini) *** * *** **** **** ****   ****   ****
L'Avventura (Antonioni) *** *** ** **** **** ****   **** ****  
La Garçonnière (Wilder) ** **** *** *** *** **** *** ** **** ****
Traquenard (N. Ray) **** ** *** *** *** ***   **** ****  
La Complainte du sentier (S. Ray) **** *** *** *** *** ****        
Tirez sur le pianiste (Truffaut) **** *** *** *** *** *** **** ** *** ***
Soudain l'été dernier (Mankiewicz) *** ** **** **** **** *** ** *** **** **
L'Aventurier du Rio Grande (Parrish) ** ****     ****         ***
Le Sergent noir (Ford) **** **     **** *     **** ***
La Source (Bergman) *** ** ***   **** * *** ***   ****
L'Impasse des violences (Gilling)     ***   ****   ***      
Temps sans pitié (Losey) *** ***   ***           ***
La Ballade du soldat (Tchoukhraï) * ***             **** ****
Le Coup de l'escalier (Wise)   ***     ****          
Le Vent de la plaine (Huston) **     *** ***     ** *** ***
Les Bonnes Femmes (Chabrol) *** **** *** **     **      
Les Maîtresses de Dracula (Fisher) **       **** ** ** ***   ***
Le Testament d'Orphée (Cocteau) *** ° *** ** *** **   *** *** ***
La Chute d'un caïd (Boetticher) *** ***     ***          
Les Corps sauvages (Richardson)       *** ***       ***  
Plein Soleil (Clément) ** *** ** ** *** * *** ***    
Nazarin (Buñuel) ***   **   *** **   ***    
Classe tous risques (Sautet) ** ** ** ** ** ** *** ***   ***
Opération jupons (Edwards)     **   ***   ** ** ** ***
Alamo (Wayne) ** ***   ** **     * ** ****
La Grande Guerre (Monicelli) *** ***   * *** **        
Les Etrangleurs de Bombay (Fisher)         ***         ***
Le Pont (Wicki)   ****                
Ben Hur (Wyler) ** * ** ** ** *   *** **** **
La Fièvre monte à El Pao (Buñuel) **   ** ** ** **   **   **
La Dame sans camélias (Antonioni) **     ***   **        
Les Légions de Cléopâtre (Cottafavi)   **     ***         **
Le Milliardaire (Cukor) *   **   *   **   *** ***
Voyage au centre de la terre (Levin)   ** **       ** **   **
Un numéro du tonnerre (Minnelli) *** ° ** **           ***
Kismet (Minnelli) ***             **    
Sur le Bowery (Rogosin)       ***   **        
Les Liaisons secrètes (Quine) ** ***                
Zazie dans le métro (Malle) **   ** ** ** ** ** * ** **
Le Rock du bagne (Thorpe) * ** ** ** **   ** *    
La Nuit de tous les mystères (Castle)     *   ***         **
La Proie des vautours (Sturges) **       *         ***
La Souris qui rugissait (Arnold)   **     **   **      
Les Dents du diable (N. Ray) * ***     **          
Donnez-lui une chance (Donen)   ***                
Le Poème de la mer (Dovjenko & Solnsteva) ***                  
Ils n'ont que vingt ans (Daves)   ***                
La Plus Grande Aventure de Tarzan (Guillermin)                   ***
Le Bourreau du Nevada (Curtiz)         **          
Milliardaire de cinq sous (Shavelson)                   ***
Ordres secrets aux espions nazis (Fuller)   ***                
Amants et fils (Cardiff)                 ***  
Un couple (Mocky) ***                  
Le Bel Age (Kast) ** * ** **            
Le Capitan (Hunebelle)     *   *   ** **   **
Come Back Africa (Rogosin)       **   **        
Les Derniers Jours de Pompéi (Bonnard)               **   **
Normandie-Niémen (Dréville)   **               **
L'Enclos (Gatti)       **       **    
La Vérité (Clouzot) °   *   *** * **   **  
Les Jeux de l'amour (De Broca) * ** **              
Austerlitz (Gance) *       *     **   **
La Bataille de Marathon (Vailati & Tourneur) **       **     *   *
Crésus (Giono) °             ** * **
La Vengeance d'Hercule (Cottafavi) ** *     **         °
Jamais le dimanche (Dassin) °       **   **      
Moderato Cantabile (Brook) *       **     *    
Terrain vague (Carné) * *             **  
Le Monde perdu (Allen) **                  
Le Scorpion noir (Ludwig)                   **
Bagarres au King Creole (Curtiz)             **      
Carthage en flammes (Gallone)                   **
Escorte pour l'Oregon (Lyon)                   **
Etoiles (Wolf)       **            
Jack l'Eventreur (Baker)       **            
La Femme nue et Satan (Trivas)     **              
La Police fédérale enquête (Le Roy) **                  
Le Monstre immortel (Freda)         **          
Les Seins de glace (Siodmak)               **    
Les Sept Voleurs (Hathaway)                   **
Tarzan l'homme-singe (Newman)           **        
Tout commença par un baiser (Marshall)                   **
L'Affaire d'une nuit (Verneuil) **                  
Les Distractions (Dupont)   **                
Les Voyages de Gulliver (Sher)               **    
Les Vieux de la vieille (Grangier) °           ** *   *
La Diablesse en collant rose (Cukor) ** °           *    
Le Sang du vampire (Cass)     *   *          
Cargaison dangereuse (Anderson) *       *          
Et mourir de plaisir (Vadim) °   *   *          
Louis II de Bavière (Käutner)   *                
Cinq Femmes marquées (Ritt)         *          
Coulez le Bismarck ! (Gilbert)         *          
L'Eau à la bouche (Doniol-Valcroze) *                  
Le Dialogue des carmélites (Agostini)               *    
Le Géant du grand Nord (Douglas)   *                
Quai du Point-du-Jour (Faurez)         *          
Tiens bon la barre matelot (Taurog) *                  
Le Bal des adieux (Vidor & Cukor)         *          
Fortunat (Joffé) °       °     *    
Le Baron de l'écluse (Delannoy) °       °          
L'Homme au bandeau noir (Miner)   °                
Katia (Siodmak)         °          
La Chatte sort ses griffes (Decoin)         °          
Comment qu'elle est (Borderie)         °          
Le Bois des Amants (Autant-Lara)   °                
Le Passage du Rhin (Cayatte) °                  
  Buster Christophe Dr.Orlof Edouard FredMJG Jean-Luc Jocelyn Ludovic Rémi Vincent

Et ceux que l'on attendra encore longtemps sur nos écrans :

  Buster Christophe Dr.Orlof Edouard FredMJG Jean-Luc Jocelyn Ludovic Rémi Vincent
La Déesse (S. Ray) **** **** ** ****   ****        
Fin d'automne (Ozu) ****   *** *** *** ***   *** *** ***
Contes cruels de la jeunesse (Oshima) *** *** *** ** **** ***       ***
La Servante (Kim)     ** *** ****          
Nuit et brouillard du Japon (Oshima) ***   **   *** ***        
Quand une femme monte l'escalier (Naruse) ****                  
L'Enterrement du soleil (Oshima) ***   **     **        
L'Etoile cachée (Ghatak) **** °       **        
Courant du soir (Naruse) ***                  
Un dur de 1900 (Torre Nilsson)       **            
Le sang séché (Yoshida)     **              
Bon à rien (Yoshida)     **              

Timothée :
**** : Psychose / A bout de souffle / L'Intendant Sansho / La Garçonnière
*** : Les Contrebandiers de Moonfleet / Les Yeux sans visage / La Dolce vita / Tirez sur le pianiste / Le Testament d'Orphée
** : Soudain l'été dernier / Les Bonnes Femmes / Opération Jupons / Ben Hur
* : L'Avventura

Antoine :
**** : Psychose / Les Contrebandiers de Moonfleet / L'Avventura
*** : A bout de souffle / L'Intendant Sansho / La Dolce vita / Traquenard / Tirez sur le pianiste / Plein soleil
** : La Garçonnière
* : Ben Hur

Nolan :
**** : Psychose
*** : A bout de souffle / La Dolce vita / L'Avventura
** : Tirez sur le pianiste / Plein soleil / Classe tous risques
* : Zazie dans le métro / Le Monde perdu

 

LES CHOIX DE NOS AMIS ET LECTEURS :

Mister Arkadin :
**** : Psychose (9) ; Moonfleet (8)
*** : Le Trou (8) ; Classe tous risques (7) ; Donnez-lui une chance (7) ; Traquenard (7) ; Le Voyeur (7) ; A bout de souffle (7) ; Soudain l’été dernier (7)
** : Alamo (6) ; Tirez sur le pianiste (6) ; Les Yeux sans visage (6) ; La Garçonnière (6) ; Terrain vague (6) ; La Vérité (6) ; Le Capitan (5) ; Fortunat (5) ; Les Vieux de la vieille (5) ; Ben-Hur (5)
* : Le Milliardaire (4) ; Le Baron de l’écluse (4) ; Les Bonnes Femmes (3)
- (vus, mais plus assez de souvenirs pour noter ; sont par définition absents ceux que j’ai vus, mais qui m’ont laissé tellement peu de souvenirs que je ne m’en rappelle même plus !) : La Dolce Vita ; Les Liaisons secrètes ; Zazie dans le métro

Frédéric :
1- Les Contrebandiers de Moonfleet, 2- L'Intendant Sansho, 3- Traquenard, 4- Psychose, 5- Les Bonnes Femmes, 6- L'Avventura, 7- La Dolce Vita, 8- A bout de souffle, 9- Les Yeux sans visage, 10- Tirez sur le pianiste

Oriane :
**** : A Bout de souffle / La Dolce Vita / Fin d'automne
*** : Psychose / Les Yeux sans visage / Tirez sur le pianiste / Soudain l'été dernier / La Servante
** : Le Voyeur / Ben Hur

Un simple amateur :
1- La Complainte du sentier (S. Ray) 2- La Source (Bergman) 3- L'Intendant Sansho (Mizoguchi) 4- L'Avventura (Antonioni) 5- A bout de souffle (Godard) 6- Psychose (Hitchcock) 7- La garçonnière (Wilder) 8- La dolce vita (Fellini) 9- Les Contrebandiers de Moonfleet (Lang) 10- Les yeux sans visage (Franju)

 

LE BOX-OFFICE :

1. Ben Hur, William Wyler, 13 843 114 entrées
2. Le Bossu, André Hunebelle, 5 844 174 entrées
3. La Vérité, Henri-Georges Clouzot, 5 692 025 entrées
4. Le Capitan, André Hunebelle, 4 877 547 entrées
5. Le Passage du Rhin, André Cayatte, 4 658 939 entrées

 

LES PRIX ET RECOMPENSES :

- Prix Louis-Delluc : Une aussi longue absence (Henri Colpi), sortie prévue en 1961
- Prix Méliès : Le Trou (Jacques Becker) & A bout de souffle (Jean-Luc Godard)
- Grand prix du cinéma français : La Vérité (Henri-Georges Clouzot)
- Oscar du meilleur film : Ben Hur (William Wyler)
- Festival de Venise, Lion d'or : Le Passage du Rhin (André Cayatte)
- Festival de Cannes, Palme d'or : La Dolce vita (Federico Fellini)
- Festival de Berlin, Ours d'or : El Lazarillo de Tormes (César Ardavin)
- Festival de Locarno, Léopard d'or : Le Bel Antonio (Mauro Bolognini), sortie prévue en 1961
- Festival de Saint-Sébastien, Coquille d'or : Romeo, Juliet a Tma (Jiri Weiss)

 

REFERENDUMS :

1) Classement des dix meilleurs films de 1960 pour les Cahiers du Cinéma  :

1. L'Intendant Sansho (Kenji Mizoguchi), 2. L'Avventura (Michaelangelo Antonioni), 3. A bout de souffle (Jean-Luc Godard), 4. Tirez sur le pianiste (Francois Truffaut), 5.  Le Poème de la mer (Alexandre Dovjenko & Julia Solnsteva), 6. Les Bonnes Femmes (Claude Chabrol), 7. Nazarin (Luis Bunuel), 8. Les Contrebandiers de Moonfleet (Fritz Lang), 9. Psychose (Alfred Hitchcock), 10. Le Trou (Jacques Becker)


2) L'année 60 vue par Positif ("Dix ans de cinéma", n°50-51-52, mars 1963) :

" - C'est l'année terrifiante, avec Les Yeux sans visage (Georges Franju), Le Voyeur (Michael Powell), L'Impasse aux violences (John Gilling), La Nuit de tous les mystères (William Castle), Psychose (Alfred Hitchcock), Les Monstres invisibles (Arthur Crabtree), Le Monstre immortel (Robert Hampton), Le Panier à crabes (Joseph Lisbona), La Femme sangsue (Edward Dein), Et mourir de plaisir (Roger Vadim), Les Maîtresses de Dracula (Terence Fisher)
- Palmarès :
Michelangelo Antonioni, L'Avventura / Jacques Becker, Le Trou / Luis Buñuel, Nazarin / Henri-Georges Clouzot, La Vérité / George Cukor, La Diablesse en collant rose / Federico Fellini, La Dolce vita / John Huston, Le Vent de la plaine / Fritz Lang, Les Contrebandiers de Moonfleet / Joseph Losey, Temps sans pitié / Louis Malle, Zazie dans le métro / Vincente Minnelli, Un numéro du tonnerre / Robert Parrish, L'Aventurier du Rio Grande / Richard Quine, Liaisons secrètes / Lionel Rogosin, Sur le Bowery & Come back Africa / François Truffaut, Tirez sur le pianiste / Billy Wilder, La Garçonnière / Konrad Wolf, Etoiles"

 

A VOUS LA PAROLE !

A notre suite, nous vous invitons à dresser votre propre palmarès de l'année et à nous le faire parvenir, par l'intermédiaire des commentaires ou du bouton de contact, afin que nous le mentionnions à son tour ci-dessus.
(vous pouvez consulter la liste de tous les films sortis en France en 1960 sur le site Encyclo-Ciné)

09/05/2013

Sur vos écrans en 1954

EDITORIAL :

tousenscene00.jpg1954, c'était Tous en scène, Voyage en Italie, El, Les Vitelloni, Marilyn, le Cinémascope... mais c'était aussi cela :

 

Par Christophe

En janvier 1954Les Cahiers du cinéma franchissaient le cap du trentième numéro. Un record pour ce genre de périodique. Le rédacteur en chef Jacques Doniol-Valcroze en profitait pour clarifier la position d'une revue à laquelle on reprochait parfois de préférer les séries B américaines aux films français dits "de qualité". Ainsi l’événement majeur de l'année serait la parution de l'article de François Truffaut Une certaine tendance du cinéma français. Après bien des hésitations, le co-fondateur André Bazin consentait enfin à publier le brûlot de son protégé. De ce fait, il entérinait la prise de pouvoir des jeunes Turcs à la rédaction. D'abord prolongement de La revue du cinéma où un joli panorama de la vie intellectuelle parisienne d'après-guerre théorisait brillamment sur le cinéma (existentialistes germanopratins, bourgeois protestants, prêtres catholiques et militants de gauche s'y côtoyaient), le mensuel se muait donc en tribune pour hussards particulièrement agités. Jacques Laurent allait d'ailleurs débaucher une bonne partie de ce petit monde pour sa prestigieuse revue Arts; Arts où, on l'oublie trop souvent, Truffaut, Rohmer, Godard et Douchet ont signé plusieurs de leurs articles majeurs.

Le point commun à tous ces jeunes gens, c'est que le cinéma constitue la base de leur formation intellectuelle. En 1954, François Truffaut n'a évidemment pas le prestige académique du mentor normalien qui l'a sorti de prison cinq ans plus tôt. Il n'a pour lui que sa sensibilité aiguë, l'aplomb de la jeunesse, un style façon Radiguet et, aussi, l'ambition d'un Rastignac (ses admirateurs doivent se souvenir de la rouerie avec laquelle il a obtenu le scénario du Journal d'un curé de campagne de Jean Aurenche*). Sa plume directe et incisive ne s'embarrasse pas des précautions oratoires de ses aînés.

Ce qui frappe donc lorsqu'on relit Une certaine tendance du cinéma français près de soixante ans après sa publication, c'est d'abord l'engagement de l'auteur par rapport à ce dont il parle. Pour s'en rendre compte, il n'y a qu'à mesurer l'abîme qui le sépare d'Alexandre Astruc lorsque celui-ci écrit en 1948 dans "Naissance d'une nouvelle avant-garde" beaucoup de choses qui seront redites par l'auteur des 400 coups. Le ton a radicalement changé. Chez Truffaut critique, la sensibilité à fleur de peau se conjugue parfaitement à la certitude du moraliste. Par intuition, il sait où sont les fausses valeurs et les attaque alors sans ménagement. "Vive l'audace certes, encore faut-il la déceler où elle est vraiment". Ce sens de la formule le rattache à la tradition frondeuse de la critique française; celle de Louis Delluc dans les années 20, celle de Lucien Rebatet sous l'Occupation. L'écrivain Truffaut a la concision du premier, la verve polémiste du second. Le spectateur Truffaut partage avec les deux les goûts qui ont toujours été ceux des authentiques cinéphiles: amour des films hollywoodiens (avant les années 60), rejet bruyant d'un certain cinéma officiel (celui promu par les grands quotidiens, les festivals, les pouvoirs publics) et défense acharnée d'une poignée d'élus considérés comme les artistes véritables. Ici, il faut en profiter pour rappeler que Une certaine tendance du cinéma français n'est pas qu'un pamphlet. C'est aussi une déclaration d'amour à Becker, Ophuls, Bresson, Cocteau, Gance et -bien sûr- Renoir. Simplement, il n'y a pas d'artiste chéri sans artiste honni, pas de critique sans distinction. Il faut aussi rappeler que Truffaut s'en prend ici à Bost et Aurenche plus qu'à aucun réalisateur. En accusant les scénaristes de la déliquescence du cinéma français, Truffaut montre l'importance du travail qui est le leur. C'est quelque chose dont devraient se souvenir les naïfs qui, tout en se réclamant abusivement de la Nouvelle Vague, opposent "mise en scène" à "scénario".

Cet article montrait aussi que la mission d'une revue comme les Cahiers n'était pas d'établir un consensus moyen, un musée officiel et relatif du bon goût, en absorbant chaque tendance de la cinéphilie, chaque courant de l'Histoire de cinéma. Tâche vaine et sans intérêt que celle d'une éponge oecuménique. Il leur fallait imposer leur vérité au monde à grand renfort de généralités théoriques. Et d'assumer ce que ces généralités peuvent avoir d'abusif avec ce qu'il faut d'esprit de provocation.

Une certaine tendance du cinéma français brille aussi par son acuité. Force est de constater que depuis soixante ans, on a rarement lu synthèse aussi juste à propos d'un pan du cinéma. En s'en prenant aussi bien à la facilité des formules qu'à la mesquinerie des scénaristes, François Truffaut cernait précisément ce qui gangrenait la production de son temps. Bien sûr, les cinéphiles intelligents savent tous que dans son ensemble, l'oeuvre d'un Autant-Lara vaut mieux que les jugements exprimés ici.** Il n'empêche que c'est bien le pessimisme de pacotille couplé à la rigidité appliquée de la mise en scène qui encore aujourd'hui rend intolérable aux yeux de ces mêmes cinéphiles Occupe toi d'AmélieLe bon Dieu sans confession ou Le rouge et le noir (tous films tournés entre 1946 et 1956). Ainsi, contrairement à une idée aujourd'hui répandue, la qualité française tel que définie par Truffaut ne se limite pas à l'académisme, qui est une tare universelle (quoiqu'excessivement répandue dans le cinéma français des années 50). C'est un mélange d'académisme, de bassesse et de noirceur facile. C'est un cinéma circonscrit à une époque (la plus sinistre du cinéma français?). C'est un cinéma qui, quoiqu'en ait écrit Serge Daney, est très différent de ceux de Carné/Prévert, Bertrand Tavernier (même si celui-ci a réhabilité Aurenche et Bost) ou Claude Sautet.

Cela n'empêche pas plusieurs passages du texte de Truffaut de s'imposer encore aujourd'hui comme des axiomes. Ainsi la phrase suivante, phrase de moraliste s'il en est: "On s'aperçoit que le public populaire préfère peut-être les naïfs petits films étrangers qui lui montrent les hommes " tels qu'ils devraient être " et non pas tels qu'Aurenche et Bost croient qu'ils sont." Cette phrase, en plus de fermer le clapet de ceux qui opposent un soi-disant élitisme de la Nouvelle Vague au "bon vieux cinéma populaire" de la qualité française, en dit bien long sur une (im)posture malheureusement éternelle. Que l'on songe à Bruno Dumont ou Gaspard Noé...

Texte essentiel s'il en est, Une certaine tendance du cinéma français cristallise un moment où la façon d'envisager le cinéma devenait plus obsessionnelle, plus intransigeante, plus érudite, plus maniaque, plus adolescente. En un mot: plus passionnée. Cinq ans après le séminal festival du film maudit de Biarritz, la cinéphilie entrait dans une sorte d'âge classique qui s'achèverait quelque dix ans plus tard avec l'apothéose mac-mahonienne. Nous aurons l'occasion d'y revenir.

 

* anecdote perfidement rapportée par Henri Jeanson dans le numéro d'avril 63 du Crapouillot
** En 1965, Rivette et Godard eux-même feraient figurer 
Le journal d'une femme en blanc parmi leurs films préférés de l'année. 

Note : Le texte de François Truffaut peut être lu ICI.

 

LES CONSEILS DE NOTRE EQUIPE :

Une liste de 102 longs métrages (sur les 513 sortis en salles), avec, pour les étoiles en couleur, des liens vers des textes écrits par les contributeurs.

  Buster Christophe Dr.Orlof Edouard FredMJG Jean-Luc Jocelyn Ludovic Timothée Vincent
Tous en scène (Minnelli) **** **** **** **** **** **** **** **** **** ****
La Vie de O'Haru, femme galante (Mizoguchi) **** **** *** **** **** ***   ****    
Voyage en Italie (Rossellini) ****     **** **** **** ** ** **** ****
El (Buñuel) **** ** *** **** **** ***   ****    
Les Vitelloni (Fellini) *** *** *** *** **** **   *** **** ****
Touchez pas au grisbi (Becker) *** **** ** **** ****   **** *** *** *
Rivière sans retour (Preminger) *** **** *** *** **** *** *** *** *** ***
L'Amour d'une femme (Grémillon) **** **** ***              
Monika (Bergman) **** ** *** *** *** ***   *** ** ***
Les Hommes préfèrent les blondes (Hawks) *** *** *** ** **** ** *** * *** ****
La Furie du désir (Vidor) ***     *** **** ***   **    
La Femme au gardénia (Lang) *** ***     ***     ***    
Pain, amour et fantaisie (Comencini) ** *** **
  ***         **
Ulysse (Camerini)         ***     **   ***
Ouragan sur le Caine (Dmytryk) **       ***         ***
La Tour des ambitieux (Wise)       *** ***          
Passage interdit (Fregonese)   ***               ***
Si Versailles m'était conté (Guitry) *   **   ***   **     ***
Le Manteau (Lattuada) *     **   **       ****
Les Chevaliers de la Table ronde (Thorpe) *** **   ** *** **   *   *
Mogambo (Ford) ** ***   * ** **   *   ***
La Belle Espionne (Walsh)   ***   **   **        
Les Lettres de mon moulin (Pagnol)   *               ***
La Guerre des mondes (Haskin) ***   *   ****     *   **
Tant qu'il y aura des hommes (Zinnemann) * °   *** ***     **   ***
La Perle noire (Thorpe) **       ***          
Les Rats du désert (Wise)         ***          
L'Equipée sauvage (Benedek) ** *   ** *** ** **   ** **
Les Aventures de Robinson Crusoé (Buñuel) ** * ** **           **
Le Blé en herbe (Autant-Lara) *** ***     * *   *    
Les Cinq Mille Doigts du docteur T (Rowland) *     * ***     *   ***
Plus fort que le diable (Huston) * °   ** ***         ***
Le Jardin du diable (Hathaway)   **     **         **
Romance inachevée (Mann) *** *               **
Sergent la terreur (Brooks) **     * ***          
Les Gladiateurs (Daves)             ** **   **
Hondo, l'homme du désert (Farrow)                   ***
La Charge sur la rivière rouge (Douglas)                   ***
La Femme qui faillit être lynchée (Dwan)                   ***
La Poursuite dura sept jours (Butler)                   ***
La Roulotte du plaisir (Minnelli) ***                  
Le Démon des eaux troubles (Fuller)         ***          
Le Fantôme de la rue Morgue (Del Ruth)         ***          
Vacances romaines (Wyler) * °   ** **   *** * * ***
Théodora, impératrice de Byzance (Freda)   **   ** ***          
Je dois tuer (Allen) *   **     ** **      
Monsieur Ripois (Clément) *** ° ° ** ***     *   **
Victime du destin (Walsh)   ***   *            
La Reine vierge (Sidney) *       ***          
Les Massacreurs du Kansas (De Toth)   *     ***          
Le Rouge et le Noir (Autant-Lara) ** °   ** **     *   **
Prince Vaillant (Hathaway)         **   ** *    
Comment épouser un millionnaire (Negulesco) *   *   **   * *    
Papa, maman, la bonne et moi (Le Chanois) *       °   **     **
Le Défroqué (Joannon) ** **     °          
Jour de terreur (Garnett)   °     ***          
Quand la Marabunta gronde (Haskin) *                 **
L'Implacable (Parrish)   **                
L'Emprise du destin (Saenz de Heredia)                   **
Le Monstre des temps perdus (Lourié)                   **
Retour au paradis (Robson)                   **
Deux Nigauds contre docteur Jekyll et Mister Hyde (Lamont)     **              
Fille d'amour (Cottafavi)   **                
Houdini le grand magicien (Marshall)         **          
La Brigade héroïque (Walsh)   **                
La Sorcière blanche (Hathaway)                   **
Le Roi des îles (Haskin)                   **
Passion sous les tropiques (Maté)                   **
Tempête sous la mer (Webb)     **              
Une femme qui s'affiche (Cukor) **                  
Vaquero (Farrow)         **          
Huis clos (Audry)                   **
Cadet Rousselle (Hunebelle) *       *     °   **
La Porte de l'enfer (Kinugasa) * °               **
Madame du Barry (Christian-Jaque) *       *     *    
Amour, délices et golf (Taurog)     °             **
L'Affaire Maurizius (Duvivier) ** °                
Le Grand Jeu (Siodmak)       * *          
Ali Baba et les quarante voleurs (Becker) ° ° ° ° *   ° ° ** ***
Ah les belles bacchantes ! (Loubignac) °   °   °   * *   **
La Reine Margot (Dréville) *   °   *          
Expédition du fort King (Boetticher)   *                
La Cité sous la mer (Boetticher)   *                
La Marchande d'amour (Soldati)   *                
La Première Sirène (Le Roy)                   *
Le Traître du Texas (Boetticher)   *                
Avant le déluge (Cayatte) *                  
Capitaine King (King) *                  
Deux Nigauds chez Vénus (Lamont)     *              
La Fontaine des amours (Negulesco)         *          
Les Femmes s'en balancent (Borderie)         *          
Les Révoltés de Lomanach (Pottier)                   *
Bonnes à tuer (Decoin)   *                
L'Air de Paris (Carné)   *                
Le Mouton à cinq pattes (Verneuil) °   °   °     °   **
Ne me quitte jamais (Daves)   °                
L'Ennemi public numéro un (Verneuil)         °          
Mam'zelle Nitouche (Allégret)   °                
Chaussure à son pied (Lean)   °                
Noël blanc (Curtiz)         °          
Obsession (Delannoy)               °    
Poisson d'avril (Grangier)         °          
  Buster Christophe Dr.Orlof Edouard FredMJG Jean-Luc Jocelyn Ludovic Timothée Vincent

Et ceux que l'on attendra encore longtemps sur nos écrans :

  Buster Christophe Dr.Orlof Edouard FredMJG Jean-Luc Jocelyn Ludovic Timothée Vincent
Une Femme dont on parle (Mizoguchi) *** ****       ***        
Le Grondement de la montagne (Naruse) *** ***   ***            

Antoine :
**** : La Vie de O'Haru, femme galante
*** : Les Vitelloni
** : Rivière sans retour / Les Hommes préfèrent les blondes / La Femme au gardénia / Les Chevaliers de la Table ronde
* : L'Equipée sauvage / Ali Baba et les quarante voleurs
° : Théodora, impératrice de Byzance

Nolan :
**** : Tous en scène / Les Hommes préfèrent les blondes
*** : Touchez pas au grisbi
** : Rivière sans retour
* : La Guerre des mondes / L'Equipée sauvage
° : Ali Baba et les quarante voleurs

Rémi :
**** : Voyage en Italie / Monika
*** : Rivière sans retour / Les Lettres de mon moulin
** : Les Rats du désert
* : Ali Baba et les quarante voleurs

 

LES CHOIX DE NOS AMIS ET LECTEURS :

Benjamin (La Kinopithèque) :
**** : Tous en scène
*** : Les Hommes préfèrent les blondes / Les Chevaliers de la Table ronde
** : La Guerre des mondes / Comment épouser un millionnaire / Le Monstre des temps perdus

Mister Arkadin :
**** : Tous en scène (8) ; Voyage en Italie (8) ; Touchez pas au grisbi (8)
*** : Les hommes préfèrent les blondes (8) ; Les Vitelloni (7) ; Rivière sans retour (7)
** : Si Versailles m’était conté (6) ; Mogambo (6) ; Tant qu’il y aura des hommes (6) ; L’Air de Paris (6) ; L'Équipée sauvage (5) ; Ali Baba et les quarante voleurs (5) ; La Reine Margot (5)
* : Comment épouser un millionnaire (4)
o : Poisson d’avril (3)
- (vus, mais plus assez de souvenirs pour noter ; sont par définition absents ceux que j’ai vus, mais qui m’ont laissé tellement peu de souvenirs que je ne m’en rappelle même plus !) La Furie du désir ; Monika ; La Femme au gardénia ; Pain, amour et fantaisie ; Ouragan sur le Caine ; La Belle Espionne ; La Perle noire ; Plus fort que le diable ; Le Jardin du diable ; Sergent la terreur ; La Brigade héroïque

Frédéric :
1- Voyage en Italie, 2- Tous en scène, 3- El, 4- La vie d'Oharu, 5- L'Amour d'une femme, 6- Monika, 7- Les Hommes préfèrent les blondes, 8- La Femme au gardénia, 9- Touchez pas au grisbi, 10- Rivière sans retour

Oriane :
**** : Les Vitelloni
*** : El
* : Touchez pas au grisbi / Les Lettres de mon moulin / Plus fort que le diable
° : Si Versailles m'était conté

Un simple amateur :
1- Voyage en Italie (Rossellini) 2- Tous en scène (Minnelli) 3- El (Bunuel) 4- La vie d'Oharu (Mizoguchi) 5- L'Amour d'une femme (Grémillon) 6- Monika (Bergman) 7- Une femme dont on parle (Mizoguchi) 8- Le Grondement de la montagne (Naruse) 9- I Vitelloni (Fellini) 10- Rivière sans retour (Preminger)

 

LE BOX-OFFICE :

1. Si Versailles m'était conté..., Sacha Guitry, 6 986 788 entrées
2. Tant qu'il y aura des hommes, Fred Zinnemann, 6 398 054 entrées
3. Papa, maman, la bonne et moi, Jean-Paul Le Chanois, 5 374 131 entrées
4. Touchez pas au grisbi, Jacques Becker, 4 713 585 entrées
5. Le Rouge et le Noir, Claude Autant-Lara, 4 342 365 entrées

 

LES PRIX ET RECOMPENSES :

- Prix Louis-Delluc : Les Diaboliques (Henri-Georges Clouzot), sortie prévue en janvier 1955
- Prix Méliès : Le Rouge et le Noir (Claude Autant-Lara)
- Grand prix du cinéma français : Le Blé en herbe (Claude Autant-Lara)
- Oscar du meilleur film : Tant qu'il y aura des hommes (Fred Zinnemann)
- Festival de Venise, Lion d'or : Roméo et Juliette (Renato Castellani)
- Festival de Cannes, Grand Prix : La Porte de l'enfer (Teinosuke Kinugasa)
- Festival de Berlin, Ours d'or : Chaussure à son pied (David Lean)
- Festival de Locarno, Léopard d'or : La Porte de l'enfer (Teinosuke Kinugasa), Le Mouton à cinq pattes (Henri Verneuil), Les Fruits sauvages (Hervé Bromberger), Bajaja (Jiri Trnka) et Rotation (Wolfgang Staudte)
- Festival de Saint-Sébastien, Coquille d'or : Sierra maldita (Antonio del Amo)

 

REFERENDUMS :

1) Classement des dix meilleurs films de 1954 pour les Cahiers du Cinéma (tel que l'on peut l'établir à partir des listes individuelles publiées dans le n°43, janvier 1955) :

1. El (Luis Buñuel), 2. Touchez pas au grisbi (Jacques Becker), 3. Monsieur Ripois (René Clément), 4. Les Hommes préfèrent les blondes (Howard Hawks), 5. L'Equipée sauvage (Laszlo Benedek), Les Vitelloni (Federico Fellini) & Une Femme qui s'affiche (George Cukor), 8. La Femme au gardénia (Fritz Lang), 9. Les Aventures de Robinson Crusoë (Luis Buñuel), 10. Rivière sans retour (Otto Preminger) & Plus fort que le Diable (John Huston)

(Note : Voyage en Italie de Roberto Rossellini, visible en province fin 1954, est pris en compte par les critiques en 1955 après sa sortie parisienne en avril de cette année-là)

2) L'année 54 vue par Positif ("Dix ans de cinéma", n°50-51-52, mars 1963) :

" - C'est l'année de Marilyn : Niagara, Rivière sans retour, Comment épouser un millionnaire
- Les meilleurs :
Laszlo Benedek, L'Equipée sauvage / Richard Brooks, Le Cirque infernal & Sergent-la-terreur / Luis Buñuel, El & Les Aventures de Robinson Crusoë / René Clément, Monsieur Ripois / Vittorio Cottafavi, Fille d'amour / George Cukor, Une femme qui s'affiche / Federico Fellini, Les Vitelloni / Howard Hawks, La Captive aux yeux clairs / John Huston, Plus fort que le diable / Fritz Lang, Règlement de comptes / Alberto Lattuada, Le Manteau & La Louve de Calabre / Anthony Mann, L'Appât / Vincente Minnelli, Tous en scène / Otto Preminger, Un si doux visage & Rivière sans retour / George Stevens, L'Homme des vallées perdues / King Vidor, La Furie du désir / Robert Wise, La Tour des ambitieux"

 

A VOUS LA PAROLE !

A notre suite, nous vous invitons à dresser votre propre palmarès de l'année et à nous le faire parvenir, par l'intermédiaire des commentaires ou du bouton de contact, afin que nous le mentionnions à son tour ci-dessus.
(vous pouvez consulter la liste de tous les films sortis en France en 1954 sur le site Encyclo-Ciné)

11/03/2013

Sur vos écrans en 1952

EDITORIAL :

Par le Dr. Orlof

leplaisir.jpgLe cinéma est-il un art à part entière ? Et, à ce titre, peut-il connaître les mêmes bouleversements et révolutions esthétiques que la peinture ou la littérature ? En marge des sorties traditionnelles, quelques films tendent à nous le prouver. Au début d'Hurlements en faveur de Sade, une voix-off précise d'emblée : « Au moment où la projection allait commencer, Guy-Ernest Debord devait monter sur la scène pour prononcer quelques mots d’introduction. Il aurait dit simplement : Il n’y a pas de film. Le cinéma est mort. Il ne peut plus y avoir de film. Passons, si vous voulez, au débat. ». Avec ce « film » sans images, ce jeune homme inconnu entend donner un équivalent au cinéma du « carré blanc sur fond blanc » du peintre Malevich. L'attention du spectateur est mise à rude épreuve mais le « geste artistique » passionne d'autant plus que surnagent, au milieu de cette succession d'écrans noirs et blancs, quelques phrases sublimes :  « Il y a encore des gens que le mot de morale ne fait ni rire ni crier. », « Nous vivons en enfants perdus nos aventures incomplètes ».
Monsieur Debord fait partie du groupe lettriste. Déjà l'an passé, nous avions pu voir au ciné-club du Musée de l'Homme Le Film est déjà commencé ? de Maurice Lemaître. Et cette année, ce sont deux films « lettristes » qui sont sortis sur nos écrans : L'Anticoncept de Gil.J.Wolman (que j'ai malheureusement raté) et l'étonnant Traité de bave et d'éternité d'Isidore Isou, chef de file de ce courant avant-gardiste. Là encore, il s'agit de s'inscrire dans une « histoire » du cinéma (Griffith, Von Stroheim et Buñuel sont cités...) pour proposer une nouvelle façon de faire des films. Ce travail de sape du langage cinématographique passe par une dissociation du son et de l'image (ce qu'Isou appelle le cinéma « discrépant ») et par des ciselures pratiquées à même la pellicule. Entre des images de l'artiste déambulant dans Saint-Germain-des-prés et des chutes de films recyclées, l’œuvre offre également des plages « abstraites » couplées à une poésie lettriste incantatoire et fascinante.
Moins radical mais néanmoins expérimental, signalons la sortie d'un programme regroupant une série de Films en relief et en couleurs où le génial Norman McLaren dessine directement sur la pellicule des ballets abstraits pour inventer un cinéma sans caméras (signalons aussi la sortie cette année de son court-métrage Voisins réalisé avec de véritables acteurs mais dont les mouvements sont décomposés par un procédé d'enregistrement image par image)...
Mais éloignons nous des marges de l'avant-garde pour revenir au cinéma « classique ». Du côté des sorties « traditionnelles », le cinéma américain se taille encore la part du lion. Nos collaborateurs ont apprécié l'adaptation expressionniste d'Othello de Shakespeare par Orson Welles et ont distingué une fois de plus les grands cinéastes d'Hollywood : Mankiewicz (dont on a pu voir deux films : L'affaire Cicéron et On murmure dans la ville), Anthony Mann (Les Affameurs), Nicholas Ray (La Maison dans l'ombre prouve qu'il est désormais un cinéaste avec qui il faut compter), John Ford (L'Homme tranquille) ou encore Alfred Hitchcock (L'Inconnu du Nord-Express. Notons que nous eûmes le plaisir de redécouvrir l'un des meilleurs films de sa période anglaise : Une femme disparaît).
Si le retour de Charlie Chaplin avec son très beau mélodrame Les Feux de la rampe est salué à sa juste mesure, notre équipe est plus partagée sur le cas Huston. Votre serviteur vous confiera humblement qu'il n'a guère goûté aux aventures exotiques d'African Queen et encore moins à sa Charge victorieuse.
Un des événements de cette année restera sans aucun doute la découverte sur nos écrans d'un chef-d’œuvre du cinéma japonais : construit comme un fait divers raconté de trois points de vue différents, Rashomon d'Akira Kurosawa (un nom à retenir) nous donne envie d'explorer un continent cinématographique encore trop méconnu en France.
Autre singularité de cette année 52, les deux films préférés de notre équipe sont français. A côté des succès populaires qui me laissent plutôt froid (les larmoyants Jeux interdits de René Clément, le poussif Fanfan la tulipe de Christian-Jaque, l'efficace mais très mineur Petit monde de Don Camillo de Duvivier...), Jacques Becker emporte tous les suffrages avec son magnifique Casque d'or où Simone Signoret est éblouissante. Mais notre coup de cœur va indéniablement à Max Ophüls. Le cinéaste nous avait déjà transporté avec des films comme La Ronde ou Lettre d'une inconnue. En adaptant trois nouvelles de Maupassant, il signe avec Le Plaisir son plus beau film à ce jour et une œuvre d'une élégance inouïe où chaque mouvement de caméra correspond à un élan de cœur des personnages. C'est léger, drôle, mélancolique, poignant... Bref, sublime !
Pour conclure, souhaitons une longue vie à Positif une nouvelle revue de cinéma qui a vu le jour cette année, quelques mois après les Cahiers du cinéma. Nous aurons sans doute l'occasion d'y revenir....

 

LES CONSEILS DE NOTRE EQUIPE :

Une liste de 84 longs métrages (sur les 551 sortis en salles) avec, pour les étoiles en couleur, des liens vers des textes écrits par les contributeurs.

  Antoine Buster Christophe Dr.Orlof Edouard Jean-Luc Jocelyn Ludovic Nolan Timothée Vincent
Le Plaisir (Ophuls) *** **** **** **** **** ***   ****     ****
Casque d'or (Becker)   *** **** **** **** ** **** ***     ****
Les Affameurs (Mann) *** **** ****   *** *** **** ***     ****
L'Affaire Cicéron (Mankiewicz) **** *** ***   *** ***   *** **** ****  
Rashomon (Kurosawa) *** *** *** *** **** ** *** **** ***   ****
La Flibustière des Antilles (Tourneur)   **** ****     ***   ***     ***
Othello (Welles)   *** *** *** **** ** *** ****   *** ***
La Maison dans l'ombre (Ray)   **** **** ***              
On murmure dans la ville (Mankiewicz)   ** *** *** *** **** ***     *** ***
Une femme disparaît (Hitchcock) *** *** * *** **** ** **** ***   *** ***
Les Feux de la rampe (Chaplin)   *** ** *** *** ** *** ***   *** ****
L'Inconnu du Nord-Express (Hitchcock) **** *** *   *** *** *** *** *** ** ***
Un tramway nommé désir (Kazan)   *** *** ** **** ** *** **   ***  
La Reine africaine (Huston)   *** ° ** **** ** **** **   *** ****
Un Américain à Paris (Minnelli)   ** ** *** ** ** *** ***   **** ***
L'Homme tranquille (Ford) ** **** ** ** ** ***   *   **** ****
La Porte du diable (Mann) *** ** ***               ****
Le Gouffre aux chimères (Wilder)   *** ****     **   **     ***
Le Désert de la peur (Walsh)     ****               ***
Le Rôdeur (Losey)   *** ****                
La Charge victorieuse (Huston)   *** ** * ***     ***     ****
La Cible humaine (King) *** ** **** **              
Le Démon s'éveille la nuit (Lang) * *** ***         ***     ***
Ivanhoe (Thorpe) * *** **   *** **   ***     ***
Mariage royal (Donen)   *** * ** ***   *** **   *** **
Le Jour où la terre s'arrêta (Wise) * ***         *** **     ***
Les Aventures du capitaine Wyatt (Walsh)   *** **     **   **     ***
La Chose d'un autre monde (Nyby & Hawks)   *** **       ***       **
La Montée au ciel (Buñuel)   ***     **           ***
Je l'ai été trois fois (Guitry)   ****   **              
Je sais où je vais (Powell & Pressburger)     ****                
La Terre tremble (Visconti)   **** ° * ***           ***
L'Homme au complet blanc (Mackendrick)   **   **     *** **     **
La Vérité sur Bébé Donge (Decoin)   ** ***   *** *   **      
Le Train sifflera trois fois (Zinnemann)   ** *
**   ** ** **   ** **
Jeux interdits (Clément)   * **** * ** * ** *   * ***
M le maudit (Losey)   *** ***     *   *      
Fanfan la Tulipe (Christian-Jaque)   *** * *   * ** *     ***
La Vie d'Emile Zola (Dieterle & Rapper)   ***                  
Quarante-Neuvième Parallèle (Powell)               ***      
L'Evadé du bagne (Freda)               ***      
Traité de bave et d'éternité (Isou)       ***              
Escale à Broadway (Butler)             ***        
Gendarmes et voleurs (Monicelli & Steno)   ***                  
J'ai vécu l'enfer de Corée (Fuller)   ***                  
La Mère du marié (Leisen)     ***                
Baïonnette au canon (Fuller)   *** *                
David et Bethsabée (King)   ** **                
Fort invincible (Douglas)       **             **
La Vallée de la vengeance (Thorpe)   **                 **
Le Choc des mondes (Maté)   **                 **
Quatorze Heures (Hathaway)     *   ***            
Le Petit Monde de Don Camillo (Duvivier) * ** * **       *     **
Une place au soleil (Stevens)   * °               ****
Les Belles de nuit (Clair)       °       **     ***
Umberto D. (De Sica)   * °   ***            
La Fête à Henriette (Duvivier)   * **   *            
La Dame sans passeport (Lewis)   ** *                
Les Sept Péchés capitaux (collectif)             ** *      
Dallas, ville frontière (Heisler)     **                
Kansas en feu (Enright)     **                
Marqué au fer (Maté)                     **
Volets clos (Comencini)     **                
Deux Sous d'espoir (Castellani)         **            
Le Peuple accuse O'Hara (Sturges)   **                  
La Vallée des géants (Feist)                     **
Les Diables de Guadalcanal (Ray)   *       *         *
Le Continent perdu (Newfield)       °   **          
Show Boat (Sidney)               *     *
Satan conduit le bal (Gallone)               *      
Vingt-Quatre Heures chez les martiens (Neumann)       *              
Elle n'a dansé qu'un seul été (Mattsson)               *      
Le Grand Caruso (Thorpe)   *                  
Nez de Cuir (Allégret)               *      
Le Banni des îles (Reed)   *                  
Le Paradis des mauvais garçons (Sternberg)     *                
Mara Maru (Douglas)     *                
Nous sommes tous des assassins (Cayatte)   *                  
Ouvert contre X (Pottier)               *      
Adorables Créatures (Christian-Jaque)   *           °      
Coiffeur pour dames (Boyer)   °   *              
Quartier interdit (Fernandez)       °              
Le Rideau rouge (Barsacq)     °                
Violettes impériales (Pottier)   °                  
  Antoine Buster Christophe Dr.Orlof Edouard Jean-Luc Jocelyn Ludovic Nolan Timothée Vincent

Et ceux que l'on attendra encore longtemps sur nos écrans :

  Antoine Buster Christophe Dr.Orlof Edouard Jean-Luc Jocelyn Ludovic Nolan Timothée Vincent
L'Eclair (Naruse)   ***     ***            
Le Goût du riz au thé vert (Ozu)   **** °   ** **          
Hurlements en faveur de Sade (Debord)       ***              

 

LES CHOIX DE NOS AMIS, LECTEURS ET AUTRES CONTRIBUTEURS :

Rémi (Il a osé !) :
**** : Le plaisir / Les feux de la rampe / L'inconnu du Nord-Express / L'Homme tranquille
*** : Les affameurs / L'affaire Cicéron / Un américain à Paris / La Porte du diable / Jeux interdits / African Queen
** : Othello / La cible humaine / Le train sifflera trois fois
* : Les diables de Guadalcanal
° : Le petit monde de Don Camillo

FredMJG (Les nuits du chasseur de films) :
La quinzaine prodigieuse : Rashomon / L’affaire Cicéron / L’inconnu du Nord-Express / L’homme tranquille / Casque d’or / Les affameurs / Othello / La maison dans l’ombre / La flibustière des Antilles / Les feux de la rampe / Le plaisir / Le démon s’éveille la nuit / Le gouffre aux chimères / Une femme disparaît / J’ai vécu l’enfer de Corée
Les excellentes pelloches : Le jour où la terre s’arrêta / Le choc des mondes / La cible humaine / Le rôdeur / Baïonnette au canon / La chose d’un autre monde / La porte du diable / Une place au soleil / La vérité sur Bébé Donge / La reine africaine / Un tramway nommé désir / Un Américain à Paris / L’homme au complet blanc / Racket / Le train sifflera trois fois / Les aventures du capitaine Wyatt / Ivanhoé
La découverte tardive [mais ô combien plaisante] : L’espion
Les nanars magnifiques : Le paradis des mauvais garçons / Anna
Les gros mélos des familles : Deux sous d’espoir / Jeux interdits
(le détail ICI)

Benjamin (La Kinopithèque) :
**** : Rashomon*** : La Chose d'un autre monde

Mister Arkadin :
**** : Les Feux de la rampe (10) / Le Plaisir (10) / Les Affameurs (9) / L’Affaire Cicéron (8)
*** : La Flibustière des Antilles (8) / Othello (8) / Une femme disparaît (8) / L’Inconnu du Nord-Express (8) / L’Homme tranquille (8) / La Porte du diable (7) / Rashomon (7) / Ivanhoe (7) / Je l’ai été trois fois (7) / Quatorze heures (7)
** : On murmure dans la ville (6) / Un Américain à Paris (6) / Le Gouffre aux chimères (6) / La Fête à Henriette (6) / Les Aventures du Capitaine Wyatt (6) / La Cible humaine (6) / Le train sifflera trois fois (6) / Jeux interdits (6) / Fanfan la tulipe (6) / Le démon s’éveille la nuit (5) / Mariage royal (5) / Le Petit Monde de Don Camillo (5)
* : Les Belles de nuit (4) / Un tramway nommé désir (3)
- (vus, mais plus assez de souvenirs pour noter) Le Désert de la peur / La Vérité sur Bébé Donge / Nez de cuir

Frédéric :
1- Le Plaisir, 2- La Flibustière des Antilles, 3- L'Inconnu du Nord-Express, 4- Les Affameurs, 5- L'Affaire Cicéron, 6- Une femme disparait, 7- La Maison dans l'ombre, 8- L'Homme tranquille, 9- Les Aventures du capitaine Wyatt, 10- Casque d'or

Oriane :
**** : Othello / Les Feux de la rampe / L'Inconnu du Nord-Express / Un Américain à Paris / Le Goût du riz au thé vert
*** : Les Affameurs / L'affaire Cicéron / Rashomon / Nous sommes tous des assassins
** : Une Femme disparaît / Le Train sifflera trois fois / Umberto D.
* : Le Petit monde de Don Camillo

Un simple amateur :
1- Rashomon (Kurosawa) 2- Le Plaisir (Ophuls) 3- L'Inconnu du Nord-Express (Hitchcock) 4- Les Affameurs (Mann) 5- L'Affaire Cicéron (Mankiewicz) 6- Le Rôdeur (Losey) 7- Le Désert de la peur (Walsh) 8- La Maison dans l'ombre (Ray) 9- La Flibustière des Antilles (Tourneur) 10- Casque d'or (Becker)

 

LE BOX-OFFICE :

1. Le Petit Monde de don Camillo, Julien Duvivier, 12 791 168 entrées
2. Violettes impériales, Richard Pottier, 8 125 766 entrées
3. Fanfan la Tulipe, Christian Jaque, 6 726 744 entrées
4. Ivanhoe, Richard Thorpe, 6 354 681 entrées
5. Les Feux de la Rampe, Charles Chaplin, 6 133 697 entrées

 

LES PRIX ET RECOMPENSES :

- Prix Louis-Delluc : Le Rideau cramoisi (Alexandre Astruc), sortie prévue en mars 1953
- Prix Méliès : Les Belles de nuit (René Clair)
- Oscar du meilleur film : Un Américain à Paris (Vincente Minnelli)
- Festival de Cannes, Grand Prix : Othello (Orson Welles) & Deux sous d'espoir (Renato Castellani)
- Mostra de Venise, Lion d'or : Jeux interdits (René Clément)
- Festival de Berlin, Ours d'or : Elle n'a dansé qu'un seul été (Arne Mattsson)
- Festival de Locarno, Léopard d'or : Rapt (Charles Crichton)

 

A VOUS LA PAROLE !

A notre suite, nous vous invitons à dresser votre propre palmarès de l'année et à nous le faire parvenir, par l'intermédiaire des commentaires ou du bouton de contact, afin que nous le mentionnions à son tour ci-dessus.
(vous pouvez consulter la liste de tous les films sortis en France en 1952 sur le site Encyclo-Ciné)

06/09/2012

Sur vos écrans en 1945

EDITORIAL :

Par Edouard S.

The shop around the corner00.jpgAlors que 1945 vient à peine de filer derrière nous et que les temps sont encore difficiles, nous comprenons qu'il puisse paraître indécent de s'intéresser aux plaisirs du cinématographe. Mais après ces interminables jours de douleurs, d'angoisses, de souffrances et de privations, la vie continue. Et si des artistes poursuivent leur travail de création, pourquoi ne pas les soutenir et partager leurs émotions ? Cette année a vu arriver sur nos écrans plusieurs films américains jadis bloqués par l'occupant. On en annonce bien d'autres dans les mois à venir. Nous avons donc eu la joie de pouvoir retrouver des noms connus et constater qu'ils perduraient au sommet : Chaplin, Lubitsch, Ford, Hawks... Les deux premiers notamment, nous gratifiant d'extraordinaires comédies (nous avons enfin pu découvrir cet audacieux et malheureusement trop optimiste Dictateur tourné il y a cinq ans). Nous avons constaté qu'Alfred Hitchcock s'était remarquablement acclimaté à l'environnement américain (comme, dans une moindre mesure, notre René Clair) et que Raoul Walsh avait réalisé avec Aventures en Birmanie l'un des meilleurs films de guerre. Nous avons ri avec Laurel et Hardy dans Têtes de pioche. George Cukor, en revanche nous a plutôt déçu avec ses Femmes. Logiquement, le cinéma français a paru submergé par cette vague venue d'Outre-Atlantique et seule une poignée de films mérite d'être retenue. Le talent de Jacques Becker est évident mais notre groupe est partagé entre ceux qui le voient déjà grand et ceux qui attendent de lui encore mieux que Falbalas. De son côté, Marcel Carné a déjà consolidé sa réputation. Même si Les Enfants du paradis n'ont pas ébloui tous les membres de notre équipe, il est certain qu'ils marqueront l'histoire de notre cinéma national et qu'ils seront souvent cités lorsque les générations futures établiront des palmarès. Enfin, n'oublions pas Robert Bresson qui, alors qu'il n'en est qu'à son deuxième long métrage, a déjà provoqué de nombreux débats. Nous devrions reparler de cet homme-là dans l'avenir.

 

LES CONSEILS DE NOTRE EQUIPE :

Une liste de 48 longs métrages (sur les 132 sortis en salles) avec, pour les étoiles en couleur, des liens vers des textes écrits par les contributeurs.

  Asketoner Buster Christophe Dr.Orlof Edouard S. Jean-Luc L. Jocelyn M. Ludovic M. Timothée G. Vincent J.
Rendez-Vous (Lubitsch) **** **** **** **** **** ****   *** **** ****
Le Dictateur (Chaplin) **** **** ** **** **** **** **** **** *** ****
L'Ombre d'un doute (Hitchcock) *** ****   *** *** *** *** ** **** ****
Aventures en Birmanie (Walsh) ** **** ****   *** ** *** ***   ****
Les Enfants du paradis (Carné) *** *** ** ** **** **   ****   ****
La Dame du vendredi (Hawks) *** *** ***   *** ** ** ** **** ***
Sergent York (Hawks) *** *** **   **** **   ** ****  
Têtes de pioche (Blystone)   ***   *** ***     ***   ***
Les Hommes de la mer (Ford)   ** ****             ****
Les Dames du bois de Boulogne (Bresson) **** **** ° ** **** ** *** *** *** **
Falbalas (Becker)   *** **** ** ** *   *    
Espoir (Malraux) ** ***   *           ***
C'est arrivé demain (Clair)   **           **   ***
Tarzan trouve un fils (Thorpe)       **   ** ** *   ***
Air Force (Hawks)   ** ***              
La Vie de Thomas Edison (Brown)   **               ***
Femmes (Cukor)   **   *** * **   * ** **
La Vie privée d'Elisabeth d'Angleterre (Curtiz)   *** *       **      
Adieu jeunesse (King)     ***              
Espionne à bord (Powell)               ***    
O toi ma charmante (Seiter)                   ***
Sept Amoureuses (Borzage)     ***              
Boule-de-Suif (Christian-Jacque)   ** *         **   ***
Naïs (Leboursier)   * **         *   ***
Griffes jaunes (Huston)   **               **
Lady Hamilton (A. Korda)   **       **        
Victoire sur la nuit (Goulding)         ** **        
Place au rythme (Berkeley)   *           **    
Sortilèges (Christian-Jacque)   ** *              
La Fiancée des ténèbres (de Poligny)   **                
La Proie du mort (Van Dyke)   **                
Le Gros Lot (Sturges)                 **  
Le Retour du docteur X (Sherman)             **      
Madame veut un bébé (Leisen)       **            
Prisonniers du passé (Le Roy)           **        
Pourquoi nous combattons (Capra, Litvak & Veiller)           **   °    
Destination Tokyo (Daves)               *    
L'Invité de la onzième heure (Cloche)               *    
La Boîte aux rêves (Y. Allégret)               *    
La Vie de bohème (L'Herbier)   *                
Le Livre de la jungle (Z. Korda)     *              
Untel père et fils (Duvivier)   *                
Félicie Nanteuil (M. Allégret)   *           °    
La Cage aux rossignols (Dréville)   *           °    
La Ferme du pendu (Dréville)   °                
La Part de l'ombre (Delannoy)               °    
Le Cavalier noir (Grangier)               °    
Le Roi des resquilleurs (Devaivre)   °                
  Asketoner Buster Christophe Dr.Orlof Edouard S. Jean-Luc L. Jocelyn M. Ludovic M. Timothée G. Vincent J.

 

LES CHOIX DE NOS AMIS, LECTEURS ET AUTRES CONTRIBUTEURS :

Antoine R. :
**** : Rendez-vous
*** : L'Ombre d'un doute / Victoire de Tunisie
** : Le Dictateur / Les Dames du bois de Boulogne

Nolan :
**** : Le Dictateur / L'Ombre d'un doute
*** : Rendez-vous / Les Enfants du paradis
° : La Cage aux rossignols

Rémi (Il a osé !) :
**** : La Dame du vendredi / Le Dictateur / Les Dames du bois de Boulogne
*** : L'Ombre d'un doute
** : Les Enfants du paradis
* : Naïs

FredMJG (Les nuits du chasseur de film) :
Le quinté gagnant : Le Dictateur / L'Ombre d'un doute / Les Enfants du paradis / La Dame du vendredi / Les Dames du bois de Boulogne
Quelques excellentes pelloches : La Vie privée d'Elisabeth d'Angleterre / Têtes de pioches / C'est arrivé demain / A chaque aube je meurs / Sergent York / Falbalas
Hors compétition : Espoir
La curiosité : Le Retour du docteur X
(le détail, ici)

Benjamin (La Kinopithèque) :
**** : L'Ombre d'un doute
*** : Le Dictateur

Mister Arkadin :
**** : La Dame du vendredi
*** : C'est arrivé demain / L'Ombre d'un doute / Rendez-Vous
** : Aventures en Birmanie / Boule-de-Suif / La Cage aux rossignols / Le Dictateur / Les Enfants du paradis / Naïs / Tarzan trouve un fils / Untel père et fils
* : Les Dames du bois de Boulogne / Falbalas / Femmes / La Fiancée des ténèbres / Griffes jaunes / Le Père Goriot / Têtes de pioche
° : Bifur 3 / Espoir / Sergent York

Frédéric :
1- Rendez-vous, 2- Les Dames de bois ce Boulogne, 3- L'Ombre d'un doute, 4- Le Dictateur, 5- Aventures en Birmanie, 6- La Dame du vendredi, 7- Les Hommes de la mer, 8- Falbalas, 9- Les Enfants du paradis, 10- Sergent York

Oriane :
**** : Le Dictateur / Les Enfants du Paradis
*** : L'Ombre d'un doute

Julien :
1/ Le dictateur ****, 2/ Les dames du bois de Boulogne ****, 3/ Rendez-vous ****, 4/ L'ombre d'un doute ***, 5/ Les enfants du paradis ***, 6/ La dame du vendredi ***

Un simple amateur :
1- Rendez-vous (Lubitsch) 2- Le Dictateur (Chaplin) 3- Les Dames du bois ce Boulogne (Bresson) 4- Les Enfants du paradis (Carné) 5- L'Ombre d'un doute (Hitchcock) 6- Aventures en Birmanie (Walsh) 7- Les Hommes de la mer (Ford) 8- Falbalas (Becker) 9- La Dame du vendredi (Hawks) 10- Sergent York (Hawks)

Pierre :
1-Le dictateur (Chaplin)**** 2-Les enfants du paradis (Carné)**** 3-Le livre de la jungle (Korda)*** 4-C'est arrivé demain (Clair)*** 5-Rendez-vous (Lubitsch)*** 6-Le gros lot (Sturges)*** 7-La dame du vendredi (Hawks)*** 8-L'ombre d'un doute (Hitchcock)*** 9-Destination Tokyo (Daves)*** 10-Air force (Hawks)**
4 hors liste : L'homme en gris (Arliss)** Prisonniers de Satan (Milestone)** Service secret (French)* Gung ho (Enright)*
3 inédits : Strange illusions (Ulmer)*** Crise (Bergman)** L'île dans la brume (O'Morse)
2 courts métrages : Aubervilliers (Lothar)*** Le vampire (Painlevé)***

 

LE BOX-OFFICE :

1. Le Dictateur 8 028 720 entrées
2. La Cage aux rossignols 5 085 489 entrées
3. Les Enfants du paradis 4 768 505 entrées
4. Carmen 4 277 813 entrées
5. Le Roi des resquilleurs 3 679 438 entrées

 

LES PRIX ET RECOMPENSES :

Prix Louis-Delluc : Espoir (André Malraux)
Oscar du meilleur film : La route semée d'étoiles (Leo McCarey), sortie française prévue en 1946

 

RESULTAT DE SONDAGE :

Sur la page Facebook de Zoom Arrière, est posée la question "Quels sont les meilleurs films sortis en France en 1945 ?" Au soir du 26 septembre, 96 votes ont été enregistrés, dégageant ce classement :
1. L'Ombre d'un doute (17 voix), 2. Le Dictateur (13), 3. Rendez-vous (11), 4. La Dame du vendredi (8), 5. Les Enfants du paradis & Les Dames du bois de Boulogne (7), 7. Aventures en Birmanie (6), 8. Sergent York (4), 9. Têtes de pioches & C'est arrivé demain (3)

 

A VOUS LA PAROLE !

A notre suite, nous vous invitons à dresser votre propre palmarès de l'année et à nous le faire parvenir, par l'intermédiaire des commentaires ou du bouton de contact, afin que nous le mentionnions à son tour ci-dessus
(vous pouvez consulter la liste de tous les films de long métrage sortis en France en 1945 sur le site Encyclo-Ciné)